Macron veut tenter une ''approche nouvelle'' en Afrique
"Répondre à une demande de partenariat" par "une approche nouvelle" en Afrique, acteur majeur des enjeux du monde: telle est l'ambition affichée par le président français Emmanuel Macron, qui présente, ce lundi, sa vision des relations avec un continent où la France perd de l'influence au profit de puissances comme la Chine et la Russie, sur fond de guerre en Ukraine.
Plus de cinq ans après le discours de Ouagadougou où il avait proclamé la fin de la "Françafrique" héritée des temps coloniaux, le chef de l'Etat interviendra devant la presse à l'Elysée 48 heures avant de s'envoler pour l'Afrique centrale où il participera à un sommet environnemental au Gabon avant une tournée éclair en Angola, au Congo et en République démocratique du Congo.
Aucun pays du Sahel ne figure au programme, alors que les troupes françaises viennent de quitter le Mali et ont mis fin à leur mission au Burkina Faso après des années de lutte contre des groupes terroristes.
Dans son discours, Emmanuel Macron devrait redéfinir les modalités de la présence militaire en Afrique pour les quatre ans à venir. Paris est encore présent au Tchad et au Niger, notamment.
Les retraits de l'armée tricolore s'inscrivent dans un contexte de perte d'influence de la France au profit de pays comme la Chine, la Turquie, l'Inde et la Russie, qui fait désormais figure de partenaire militaire majeur de l'Afrique via des ventes d'armes et la présence de la milice Wagner.
Cette poussée est doublée d'une offensive via les réseaux sociaux - dépeignant la France comme une puissance néo-coloniale - face à laquelle Emmanuel Macron a demandé, lors de la dernière conférence des ambassadeurs, d'être "plus réactifs".
Un décalage complet
"La France a été prise d'une pulsion interventionniste et il y a eu un décalage complet entre les bonnes intentions affichées et la perception qu'en ont eue les Africains", explique à Reuters Roland Marchal, du Centre d'études internationales de Sciences Po.
"Oui il y a une propagande russe. Mais la propagande française en Afrique a existé et existe encore sur la façon d'écrire ce qu'on a fait en essayant d'être du côté du bien, ce qui a permis de ne pas à répondre aux questions posées. Il est naïf de penser que les gens détestent la France simplement parce que Wagner s'agite", ajoute-t-il.
Le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, vient de terminer une troisième tournée depuis le début de la guerre en Ukraine en Afrique, où il cherche des soutiens lors des votes aux Nations unies.
Jeudi, veille du premier anniversaire du conflit, le Mali a voté pour la première fois contre une résolution de l'Assemblée générale de l'Onu appelant à la cessation des hostilités en Ukraine, largement adoptée par ailleurs.
D'une manière générale, les pays africains rechignent à prendre parti dans ce conflit sanglant qui bouleverse les équilibres mondiaux.
Cette lutte d'influence en Afrique, particulièrement aiguë entre Paris et Moscou, ne saurait pour autant être le moteur de la tournée présidentielle, assure l'Elysée.
"On ne conçoit pas ce déplacement comme une course et une escalade dans la désinformation et l'intimidation. On laisse ces méthodes à d'autres", dit la présidence. "Notre préoccupation est d'être clairs et lisibles sur ce qu'on a à offrir dans notre partenariat".
"Le but de ce voyage n'est pas de ressortir en étant d'accord sur tout, mais de partager des visions du monde et d'essayer de converger. Face aux menaces stratégiques qui sont devant nous, que ce soient la guerre en Ukraine, les chocs économiques, pandémiques, il est crucial que l'Europe et l'Afrique soient les plus alignés et les plus intimes possibles dans leur dialogue."
(Reuters)